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Titaille

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Si vous aussi vous avez déjà ressenti cette impression d’être étranger à ce monde dans lequel vous vivez, cette histoire devrait vous faire écho et vous donner quelques clés pour la suite. 

Un jour, dans un village de Pitipays, naquit un invisible. Lorsqu’il fut découvert par ses semblables, on l’amena au cœur du village pour pouvoir le présenter. Certains invisibles regardaient ce nouvel arrivant avec curiosité.
En effet, il possédait des jambes étonnamment courtes et des bras particulièrement longs.
Les invisibles firent fi de ces quelques particularités et accueillirent ce nouveau venu en le baptisant Titaille.
Titaille se révéla être un invisible plein d’entrain, toujours prêt à rendre service, à aider ses proches. Hélas, son corps l’empêchait d’accomplir parfaitement tout ce qu’il entreprenait. Bien souvent, il se retrouvait dans la position de celui qui demandait de l’aide alors qu’il était en train d’aider quelqu’un, cela le frustrait. Il sentait bien qu’il n’était pas en pleine possession de ces moyens comparé à d’autres invisibles.

Lorsqu’il se sentit enfin prêt, il se décida à rejoindre une des brigades de Pitipays. Il tenta sa chance auprès de Dame Faunia, qui l’accepta volontiers lui disant qu’il arrivait à point nommé. En effet, beaucoup de naissances avaient eu lieu ces derniers temps. C’était le printemps, les matinées encore fraîches et brumeuses laissaient vite place aux rayons du soleil venant illuminés les brins d’herbe recouverts de rosée. Les invisibles de Dame Faunia n’étaient pas assez nombreux pour venir en aide aux nouvelles mères qui avaient, elles-aussi, besoin de se reposer. 

Titaille se retrouva donc avec une portée de cinq jeunes lapereaux à surveiller, le temps que la mère finisse de reprendre des forces. Le terrier était un peu sombre mais bizarrement Titaille y voyait comme en plein jour. Il s’assit face aux cinq petites boules blotties contre leur mère.
Tout allait bien jusqu’à ce que l’un des nouveaux nés se mit à rouler et, soudainement, disparu sous terre. La scène choqua Titaille qui se précipita vers l’endroit où le petit être s’était évaporé. Il découvrit un petit tunnel qui, visiblement, menait à une autre galerie. Quelques pas plus bas, on y distinguait la petite boule remuante. Sans hésiter, Titaille sauta dans le trou et se retrouva à coté du lapereau, il commença à le pousser pour le faire remonter le long du tunnel. Ses bras étaient assez longs pour atteindre les bords du trou mais pas assez fort pour les remonter lui et le petit animal. Ses jambes quasiment inexistantes ne lui permettaient pas d’exercer une force suffisante sur le sol pour l’aider dans la remontée.
Il se rendit compte de son impuissance lorsqu’une tête apparut à la surface du trou. C’était un invisible qui, entendant des bruits curieux qui émanaient du terrier, s’était rapproché de ce dernier. Il comprit alors que les bruits provenaient du trou, de Titaille s’efforçant de remonter à la surface et du jeune lapereau réclamant la chaleur de sa mère.
L’invisible discernait à peine Titaille mais comprit vite la situation. Il tendit sa main, trop courte pour atteindre celle de Titaille, mais c’était sans compter sur la longueur du bras du petit invisible qui, au delà de se saisir du bras de son sauveur, s’y enroula totalement. Son autre bras s’enroula autour du lapereau et tous deux purent enfin être remontés.
Le lapereau fut déposé auprès de sa mère, quelque peu réveillée par les petits cris de ce dernier.
Les deux invisibles, voyant la mère s’occuper de ses petits, en profitèrent pour sortir du terrier. 

Titaille découvrit plus en détail l’invisible qui lui était venu en aide. Il était grand, avec de longues jambes et des bras puissants. Notre jeune invisible ne put s’empêcher de le regarder avec admiration.
« Merci de m’avoir aidé, je ne sais pas comment je m’en serais sorti sans vous, dit Titaille en regardant le sol.
– Aucun problème, répondit l’invisible d’un air doux, tu sais je t’observe depuis un petit moment et je ne pense pas que ta place soit ici.
– Je… je sais bien, dit Titaille d’une voix tremblante, je ne compte pas rester au village, je voulais montrer que j’étais à la hauteur mais ça ne sert à rien, je…
-Euh… désolé, je me suis mal exprimé, je recommence, je pense que ta place n’est pas dans cette brigade. Suis-moi, ce sera plus simple. »
Titaille suivit l’invisible sur un long chemin, jusqu’à arriver devant un grand espace où il n’y avait pratiquement que de la terre humide.
Une dizaine d’invisibles s’afféraient à transporter de petits objets que Titaille n’arrivait pas bien à distinguer. Ne voyant pas que son guide venait de s’arrêter, Titaille fut stoppé net par ce dernier.
« Bonjour Dame Floria, dit l’invisible.
– Ah, bienvenue Perium, vous tombez bien! répondit Dame Floria, nous aurions bien besoin de bras supplémentaires pour disperser toutes ces graines avant que le printemps ne se finisse.
– Justement, dit Perium en amenant doucement Titaille devant lui, voici celui dont je vous ai parlé, je pense qu’il pourra vous être d’une grande aide.
– Et bien voyons cela, répondit Dame Floria en regardant Titaille avec douceur.
Titaille ne sut quoi dire, il se contenta de suivre l’invisible, dont il connaissait à présent le nom, trop abasourdi de cette première rencontre avec Dame Floria.

Ils se dirigèrent tous deux vers le tas de graines. Les autres invisibles ne prêtèrent guère attention à nos deux compères, bien trop occupés à planter les graines au plus vite.
« Perium, pourquoi m’avez-vous amené ici, chuchota Titaille pour ne pas se faire entendre des autres invisibles, je ne pourrai jamais marcher aussi vite qu’eux, ces allers et retours vont me faire perdre un temps fou.
– Tu n’es peut-être pas obligé de marcher, dit Perium en regardant ses bras. »
Titaille mit quelques instants à comprendre le sens des mots de Perium. Alors il prit une graine et se retournant, il allongea son bras si loin que celui-ci passa par dessus la tête d’un invisible qui le regarda curieusement. Avec la vitesse du lancé, sa main, en retombant, alla se ficher directement dans le sol. Titaille y lâcha la graine puis son bras revint à lui. Les invisibles, interloqués, suivirent la main retournant à son possesseur qui affichait le même regard qu’eux.
Titaille et Perium échangèrent alors un regard complice. Titaille retenta l’expérience dans une autre direction, la graine s’enfonça dans le sol encore plus rapidement que la première fois. Les autres invisibles commencèrent à rire et applaudir en direction de Titialle qui prenant confiance et plaisir, prit une graine dans chaque main et envoya ces dernières dans deux directions opposées.
Notre invisible allait de plus en plus vite et en quelques instants le tas de graines se réduisit à une dizaine. C’est alors que Titaille eut une nouvelle idée, il attrapa les quelques graines qui restaient sur le sol et les mis sous son chapeau. À ce moment-là, même Perium s’interrogea sur ce que le jeune invisible voulait mettre en oeuvre. Titaille, avec son chapeau chargé de graines, se mit tranquillement à marcher, tout en continuant d’envoyer ses bras de plus en plus loin. Ainsi, il couvrait plus de distance et permettait aux futurs jeunes pousses de grandir en toute liberté.
Dame Floria vint à la rencontre de Titaille, lui adressa un grand sourire et lui dit :
« Vous êtes l’un des invisibles les plus exceptionnels qu’il me fut permis de rencontrer, votre aide nous sera plus que précieuse, acceptez-vous que je prévienne Dame Faunia que désormais votre place est parmi nous?
– …bien sûr, répondit fébrilement Titaille, avec plaisir! »
Dame Floria s’en alla, les autres vinrent en souriant à la rencontre de Titaille.
Perium adressa un regard empli d’amitié à notre invisible qui le lui rendit.
Titaille avait enfin trouvé sa place et il avait compris. Il avait compris que chaque être quel qu’il soit avait sa place, que chaque être était exceptionnel et qu’il fallait saisir chaque occasion pour pouvoir se réaliser.

N’hésitez pas à me dire ce que vous avez pensé de cette petite histoire! 😉

La roche effigie

Pssssssttt

Regardez sur quoi je suis tombé lors d’une promenade en forêt. ça ressemble à un miroir tout en ayant cet aspect rocheux.

Au début j’ai vraiment hésité à tenter d’y voir mon reflet, mon image devenait trouble.
J’ai pris mon courage à deux mains, après tout on ne tombe pas sur ce genre de roche tous les jours. En regardant fixement mon reflet qui s’évaporait, j’ai soudainement vu qu’un autre visage prenait sa place.
Un visage qui me ressemblait beaucoup mais avec un chapeau pointu.

En temps normal, je ne suis pas très à l’aise avec un couvre-chef, mais j’avoue que celui-ci me va plutôt bien.

Soufliman

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Soufliman est un invisible qui est arrivé à Pitipays depuis peu. Auparavant, il vivait surtout dans des contrées plus au sud avec son peuple.
Sentant que son destin était ailleurs et ayant envie de découvrir le monde, il décida de partir à l’aventure.
Il aurait dû continuer son périple plus au nord mais lorsqu’il arriva à Pitipays, il fut accueilli si chaleureusement par Dame Faunia qu’il décida de s’attarder quelque temps sur ces nouvelles terres. Lors de leur rencontre, Dame Faunia était en train de s’occuper d’oisillons, avec d’autres invisibles de sa brigade, le temps que leur mère revienne avec de quoi les nourrir. Les oisillons semblaient frigorifiés en cette matinée de printemps qui gardait pourtant des restes de l’hiver glacial qu’avait connu Pitipays. Tellement froid que certains invisibles avait décidé de ne pas sortir de leur habitat durant une bonne partie de la saison.
Soufliman alla se présenter à Dame Faunia et ses compagnons. Devant les oisillons recroquevillés, il sortit quelques touffes duveteuses de l’intérieur de son chapeau qu’il plaça entre les oisillons et sur les bords du nid. Quelques instants plus tard, de petites têtes apparurent par dessus les touffes, et quelques gazouillis se firent entendre. Les petits semblaient en meilleures conditions pour attendre le retour de leur mère avec le repas.
Dame Faunia fut agréablement surprise par cette matière.
« Cela ressemble à du pelage, dit-elle en examinant le reste d’une touffe qui volait au vent devant elle.
– En effet, dit Soufliman, les invisibles de mon peuple ont pris l’habitude de récolter les poils que certains animaux perdent lors de leurs mues. Généralement, nous les utilisons plutôt en protection lorsque nous travaillons en hauteur pour que toutes chutes soient sécurisées. Mais nous avons remarqué que cela pouvait aussi servir d’isolant contre le froid tout en gardant ce coté douillet.
– Impressionnant, dit dame Faunia en pleine réflexion sur le sujet. Soufliman, que diriez-vous de rester quelque temps parmi nous. Je suis sûre que vous pourriez nous en apprendre beaucoup sur votre culture et peut-être découvrir certaines choses de la nôtre.
Soufliman réfléchit, il était partagé entre son empressement de découvrir le monde qui l’attendait et cette parenthèse à son voyage qui pouvait se révéler enrichissante. Son regard se fixa sur celui de Dame Faunia.
– Je prends cette rencontre comme un signe du destin, dit Soufliman en souriant, je reste. »

N’hésitez pas à me dire ce que vous avez pensé de cette petite histoire! 😉

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